C’est plus de deux ans de travail qui auront été nécessaires pour que l’exposition Ressemble à personne ne voie le jour. Dans un processus rigoureux, des concertations et des rencontres ont été organisées avec différents acteurs des milieux communautaires, de l’enseignement, de la santé ainsi que différents groupes formés d’enfants et d’adolescents.
Puisque l’exposition a pour objectif d’ouvrir la discussion sur ce sujet d’actualité, nous trouvions important de pousser plus loin la réflexion en vous offrant le point de vue d’Andrée-Ann Dufour Bouchard, cheffe de projets au sein de l’organisme EquiLibre.
Nous tenons à la remercier pour son enthousiasme et sa grande contribution au projet.
Titulaire d’une maîtrise en nutrition de l’Université Laval, Andrée-Ann dirige des projets traitant de l’image corporelle, autant pour sensibiliser le grand public que pour former des intervenants et des professionnels de la santé. Elle s’efforce de promouvoir une relation positive avec le corps, la nourriture et l’activité physique, tout en démystifiant les croyances erronées sur le poids. Elle contribue à des comités de travail et des mandats d’expertise au Québec et à l’international, cherchant à créer des environnements inclusifs.
Les jeunes et l’image corporelle : mieux comprendre, mieux accompagner
Saviez-vous qu’au Québec, près du quart des jeunes de 14 à 17 ans souhaitent maigrir, peu importe leur poids[1]? Que 31% vivent de l’angoisse ou du stress à cause de leur poids?
Pourquoi le poids nous préoccupe-t-il autant?
Nous vivons dans une société où la minceur est très valorisée et où les standards de « beauté » sont encore trop peu diversifiés, que ce soit dans les films, les séries ou sur les réseaux sociaux. Les personnes qui ne correspondent pas à ces idéaux irréalistes font l’objet de nombreux préjugés. Et la culture des diètes se présente comme la solution facile pour maigrir alors que les études démontrent que la majorité des gens reprennent le poids perdu à long terme.
Ce contexte amène plusieurs personnes à vivre de l’insatisfaction corporelle et les jeunes n’y échappent malheureusement pas.
La puberté est une période de grands changements corporels et les jeunes sont plus vulnérables sur le plan de l’image corporelle. Leur corps se transforme rapidement et ne ressemble généralement pas aux idéaux de « beauté » auxquels ils sont constamment exposés dans notre société. De plus, ils sont en train de construire leur identité et leur esprit critique n’est pas encore totalement développé pour pouvoir prendre un pas de recul par rapport aux modèles irréalistes ou à l’omniprésence de la culture des diètes qui les entourent.
L’insatisfaction corporelle a des impacts négatifs sur la santé physique et mentale et il est important de prévenir son développement ou de limiter son exacerbation.
Comment faire pour aider les jeunes à développer une image corporelle plus positive?
Définissons d’abord ce qu’est l’image corporelle positive. Ce n’est pas d’aimer toutes les parties de son corps ni de s’aimer parfaitement tous les jours, c’est normal d’avoir des meilleures et de moins bonnes journées. C’est plutôt d’avoir une perception réaliste et globalement positive de son corps et de pouvoir vivre sa vie sans toujours penser à son corps.
Quand un jeune a une image corporelle positive, il est plus susceptible de développer des relations harmonieuses avec les autres, d’exprimer ses limites, de manger et d’être actif pour le plaisir et pour son bien-être plutôt qu’uniquement dans le but de contrôler son poids, il aura une meilleure estime et une santé mentale plus positive.
Que nous soyons parents, enseignant.e.s., intervenant.e.s jeunesse ou tout autre adulte significatif dans la vie des jeunes, plusieurs moyens s’offrent à nous pour les aider à être bien dans leur peau.
Prendre conscience de son rôle de modèle
Dès leur plus jeune âge, les enfants nous observent, nous imitent, nous sommes leur modèle. Ainsi, les commentaires que nous faisons sur notre propre poids, sur les aliments ou sur l’activité physique peuvent les influencer positivement ou négativement. Prendre conscience de nos propres attitudes et comportements et de leur influence est la première étape pour travailler sur sa propre image corporelle comme adulte ou encore pour éviter de retransmettre des croyances ou comportements qui peuvent nuire au développement d’une image corporelle positive. On peut être un modèle positif pour les jeunes en évitant de dénigrer notre corps, en le valorisant pour ce qu’il nous permet d’accomplir, en ayant du plaisir à manger une variété d’aliments, en étant actif pour le plaisir et en bougeant avec les jeunes.
Complimenter l’être plutôt que le paraître
Dans notre société, on a souvent le réflexe de complimenter l’apparence des jeunes, mais on gagne à diversifier nos compliments. Plutôt que de valoriser principalement l’apparence, développons l’habitude de féliciter davantage les jeunes pour leurs habiletés, leurs forces, leur persévérance, leur sens de l’humour, leur créativité, leur patience, leurs efforts, leur cheminement, leur sens de l’initiative. Ainsi, leur valeur comme personne reposera davantage sur ce qu’ils sont que sur leur apparence, ce qui les protègera de l’influence du modèle irréaliste de « beauté » et de la pression de s’y conformer.
Normaliser la diversité corporelle
Les modèles auxquels les jeunes sont exposés dans les émissions, dans les jeux vidéo ou avec les jouets sont généralement minces ou musclés et assez stéréotypés. Vous pouvez questionner les jeunes afin de leur faire réaliser que ces modèles sont loin d’être représentatifs de la majorité des gens qui les entourent dans la vraie vie.
L’art est également un excellent moyen d’aborder la diversité corporelle. On peut représenter les corps de façon plus abstraite, discuter de l’évolution du modèle de beauté au fil des époques. Les réactions et les émotions ressenties à la vue de certaines œuvres sont des points de départ intéressants pour amorcer la discussion. L’exposition Ressemble à personne permet de réfléchir à ce qui rend chacun d’entre nous unique comme personne et à ce qui nous fait briller. Elle permet de discuter de l’importance de développer l’être au-delà du paraître, le tout, de façon ludique.
Pour en savoir plus sur l’image corporelle, ÉquiLibre vous propose des billets de blogue, un balado, des ateliers à animer auprès des jeunes, des formations et bien plus. Rendez-vous sur equilibre.ca ou suivez-nous sur les réseaux sociaux Facebook et Instagram.
[1] Léger pour le compte d’ÉquiLibre. (2023). Préoccupations envers le poids, l’alimentation et la pratique d’activité physique. Sondage réalisé du 2 au 11 octobre 2023 auprès de 1 803 Québécois.es âgé.e.s de 14 ans et plus.
Cet article a été rédigé par Andrée-Ann Dufour Bouchard
